Cinq heures. Tu erres dans es rues comme un gamin paumé, un air enfantin plaqué sur le visage et tu titubes de lampadaire en lampadaire alors que le soleil va bientôt pointer le bout de son nez sur une capitale qui semble dormir. T'es encore plus stone que la veille, c'est comme si chaque jour tu relevais un nouveau challenge. Combien de grammes, quelle substances, de quelle façon...Il y a mille et une manière de voir son corps courir à sa perte. Et son esprit d'ailleurs. Alors que tu lèves les yeux pour scruter le ciel, la réalité t'empoigne. Ou du moins une personne te prend par l'épaule et te tire jusqu'à ta demeure. Incapable d'aligner deux pensées cohérentes tu te laisses faire en rigolant. T'as l'impression d'avoir six ans, tu sais quand ton père te trimbalait par le col pour te ramener à la maison parce que t'avais encore pissé sur la maîtresse. T'avais de la ressource à cette époque. C'est toujours le cas d'ailleurs.

Tu te retrouves face à lui et les seuls mots que tu peux prononcer, c'est le nom par lequel t'as l'habitude de l'appeler.
« Papa. »
Tu ne t'attendais pas à une accolade certes, mais tu ne t'attendais pas non plus à une claque de cette envergure. Ils t'avaient prévenu ce jour-là que si tu revenais encore une fois à la maison complètement déchiré ils ne fermeraient pas les yeux. Trop sonné pour comprendre l'importance de ces paroles tu t'étais contenté de sourire, acquiescer et brandir la note de ton dernier devoir pour faire passer la pilule. Cependant depuis ton altercation avec Toulouse tes bonnes résolutions avaient disparu et ta routine habituelle avait repris le dessus sur la peur de la correction.

Quinze heures. Tu te réveilles enfin. Tu te souviens de rien et seules les ecchymoses sonnent comme une piqûre de rappel de ta folle nuit de débauche. Tu quittes ta chambre et tu erre doucement dans les couleurs, la tête dans le cul, les membres encore endoloris. Ta cuisine ? tu la trouves vide. Une enveloppe est posé sur le comptoir. Tu la prends et tu comptes les billets à l'intérieur. C'est fou comme on vit mal de nos jours avec seulement vingt milles balles par semaine. Ton regard se dirige sur la grande horloge murale. Quinze heures trente. T'avais rendez-vous avec Toulouse à quatorze heures. Dommage pour lui il va devoir attendre. De toute façon, il attend toujours.

T'arrives enfin sur le lieu du rendez-vous. Et à ce que tu peux voir, Toulouse n'en est pas qu'à sa première cigarette. Sans rien dire, tu t'affales sur le siège en face de lui. T'enlève tes lunettes de soleil et tu le regardes. Un air malicieux se greffe sur ton visage. Le jeu recommence. Et aucun des participants n'est autorisé à quitter les réjouissances avant la fin.